(PULP - Initiation) L’individu doit-il disparaître ? Par Noé Kirch
Vous êtes invité.es au prochain rendez-vous du programme PULP pour le mois de novembre.
PULP (Pratiques Universelles Libres et
Populaires) est un succulent projet de micro-université populaire imaginé par Ranga Langa pour l’Orée, à l’intention de toutes et tous. Celui-ci se décline en quatre modules : « portrait », « initiation », « pratique » et « discussion ».
Dans le cadre du module initiation nous accueillons une conférence de Noé Kirch sur le thème « Démocratie et crise dans la culture ».
« La notion d’individu est historiquement liée aux principes de bases des démocraties libérales occidentales. Elle constitue également un élément centrale de la philosophie néolibérale, devenue depuis près de quarante ans l’idéologie dominante de ces démocraties. Son programme se base sur la fiction d’un individu autonome et rationnel, essentiellement calculateur et égoïste. Sa vision de la société est celle d’un grand marché, où les lois de la concurrence et de la rationalité économique sont comprises comme des instruments au service de la liberté. Son idéal est celui d’une société où la politique est réglée par le marché et la morale coutumière, et où le rôle de l’État se réduit à la protection de l’ordre et de la loi.
Dans les faits, l’injonction à devenir entrepreneur de soi et la sacralisation de l’individu se couplent d’un interventionnisme croissant de l’État pour étendre le marché à toutes les sphères de la société. Le « néolibéralisme réel » est bien loin d’apporter la liberté tant vanté. Pire, la situation contemporaine dévoile les failles d’une contradiction profonde : le marché qui était censé émanciper les individus et les protéger d’un pouvoir politique arbitraire est devenu lui-même une force soumettant les individus à un ordre qui les dépasse.
Cette situation est à l’origine de mouvements populaires qui, du fait même des politiques d’individualisation des rapports sociaux, peinent à trouver des débouchés dans des processus politiques collectifs. Les individus se retrouvent seuls, isolés, submergés. En résulte une situation particulièrement instable dans laquelle se multiplient les appels à la reprise en main autoritaire du pouvoir, tant pour défendre le programme néolibérale que pour s’y opposer. Cette conséquence semble apparaitre comme une preuve de la dimension nuisible, pour la démocratie comme pour les libertés, d’un programme basé sur l’idée selon laquelle les individus seraient des entités indépendantes de la société.
L’échec du néolibéralisme doit-il pour autant nous pousser à abandonner l’idée d’individu au profit d’autres notions plus englobantes, plus susceptibles d’apporter des réponses aux problèmes contemporains tels qu’ils sont aujourd’hui formulés (écologique, sécuritaire, identitaire) ? Ou peut-on repenser cette notion pour la rendre à nouveau compatible avec l’idéal démocratique ? Cette seconde piste est celle qu’a choisi de prendre le philosophe américain John Dewey au tournant de la grande Dépression de 1929, décrivant la situation d’alors d’une manière qui résonne particulièrement avec celle que nous vivons aujourd’hui. Dans une série de huit articles, il tente de penser une nouvelle forme d’individualisme dépassant l’opposition entre individu et société. Ces articles formeront l’un de ses textes les plus célèbres : « L’individualisme – ancien et nouveau ». L’objectif de cette conférence sera de présenter ce texte et la réflexion qui l'accompagne. »
16h30 - 18h30 : conférence + temps d'échange.
Noé Kirch est chercheur au CERAS (Centre de recherche et d’action sociales) à Saint-Denis, et doctorant en sciences économiques à l’Université Lyon 2. Ses recherches s’inscrivent dans le champ de la philosophie économique. Elles portent sur les perspectives du pragmatisme philosophique de John Dewey pour les enjeux économiques contemporains, notamment écologiques.
Entrée libre !
Lieu : L'Orée 85
Ville : Strasbourg
Département : Bas-Rhin
Région : Grand Est
Pays : France
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